anything but me



Elisabeth me disait que j'avais des vibes californiennes et que ça explique un peu pourquoi j'aime pas New York. I'm a California Bitch, body and soul. C'est étrange, parce que je n'ai jamais foutu les pieds à Los Angeles et j'ai toujours cru que j'étais plutôt du type british country girl, mais la vérité est là, de la part d'une pote qui a effectivement foutu les pieds à L.A.: je suis pas là où je devrais.

Pourtant, j'en ai eu, de ces rêves de Paris, mais une fois qu'on y est, putain l'angoisse...Pour moi, c'est qu'un grand trou qui sent la naphtaline, je préfère encore mon Santerre natal. Sans doute pourquoi je suis aussi douée pour les grands écarts et les mariages bizarres. Mais l'ambiance californienne. Je sais pas. C'est la famille. Ou du moins quelque chose que j'estime en tout cas être de l'ordre du familial. Y une ambiance spéciale, là-bas, je l'ai réalisé en écoutant Clem Creevy de Cherry Glazerr en parler dans cette vidéo. J'ignore ce que c'est, ce sentiment là. Une famille, voulue ou imposée, je m'en fous. J'ai ma mère, bien sûr. Mais j'ai pas eu ces moments, ces rencontres, ces échanges. J'idéalise beaucoup la chose, dans ma tête. Quand j'entends les drames que ça implique, les repas chiants qui s'éternisent, les gueulantes entre celles et ceux qui veulent faire péter la machine et les autres qui s'en accomodent très bien. Ma mère a fait volé ça en éclats dès le départ, surtout du côté de mon père, pour pas que je subisse (même si on finit toujours, tôt ou tard, par payer les pots cassés). Mais j'aurais aimé avoir le choix, l'espoir secret de me dire que j'allais pouvoir la vivre, ma série à l'américaine. Là où tout est toujours bien qui finit bien, même après avoir foutu le feu à la baraque, failli te noyer dans la piscine et comptabilisé six comas éthyliques parmi tes potes, le tout pendant l'absence de tes vieux. Pouvoir se réfugier chez ta grand-mère, ou ta tante, sans même avoir besoin de téléphoner avant. J'ai bien eu ma première gorgée de Spirytus par mon oncle vivant en Pologne (et qui m'avait aussi expliqué comment marchait une bonne femme, au cas où je voudrais devenir lesbienne), mais c'était pas pareil, il était loin, c'était maintenant ou jamais, fallait graver ce moment dans la pierre et passablement à l'hôpital (je me suis juste contentée de m'écrouler de ma chaise). 

Pendant un temps, je les ai eus, pourtant, mes weirdos, cette composition bordélique de différentes âmes errentes. Ce sentiment illusoire d'appartenance, de faire partie d'un tout. Une espèce d'adoption, qu'on me comprenait autant que je pensais les comprendre. Mais ça ne pouvait pas durer. C'était pas appelé à durer. Après, je jette pas la pierre. 
Pour ma défense, j'étais qu'une sale conne d'adolescente, en détestation constante d'absolument tout. C'était, disons-le, à cause de moi et de mes envies d'ailleurs, de mon arrogance et de mon dédain légendaire. Et avec du recul et de la bouteile, de croire que je n'étais pas assez. De rejeter la faute. D'être en colère. En permanance. De me foutre dans le crâne que c'est le mieux que je pouvais être et d'en vouloir à celles et ceux qui me poussaient dans le sens contraire parce qu'ils refusaient de l'accepter. J'étais déjà à l'époque la Lady Bird que Greta Gerwig allait écrire. Vous voyez comment ça peut vriller quand on veut juste que quelqu'un vous demande si vous allez bien.

C'est donc comme ça que la vie s'est rappelée à moi et que je me suis retrouvée à vivre dans le 15eme en bossant dans des magazines d'art et des galeries parisiennes de mes couilles. Sur le papier, ça faisait pourtant envie, mais je pense vraiment avoir raté tellement de choses, à tellement de niveaux. Ca vous fracasse, l'air de rien, d'avancer dans un brouillard que vous aviez pourtant voulu. Les années filent et ça y est, vous y êtes, la gueule au dessus des toasts à l'avocat et des oeufs brouillés. La perte de temps abyssale que je redoutais tant. C'est drôle parce que je pensais que j'allais pouvoir rattrapper, comme je l'ai toujours fait. Mais là, je vois qu'une impasse. Je pense sincérement que ma crise de la quarantaine va être mémorable.

Apportez-moi Sunset Boulevard sur un plateau.

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