
C'est rare qu'un film me
déstabilise autant. Pas vraiment pour l'histoire en bruit de fond. Deux mecs
qui confondent terrain de tennis et séance de baise, est-ce vraiment le sujet?
Peut-être pour certains mais pas pour moi. Non. Challengers a des allures de
publicité à rallonge. Des plans séquences rythmés au son de Trent Reznor. Pas
de quoi se taper le cul par terre. Je ne me suis pas fait chier. J'ai regardé,
impassible, cherchant l'étincelle. Peut-être que j'étais comme Tashi Duncan.
J'attendais vraiment qu'ils finissent par baiser pour qu'on en finisse.
Et puis j'ai réfléchi, j'ai pris du recul, comme
dirait un commercial en burn out. Je me demande si ce n'est que moi, si
d'autres personnes ont capté la revisite d'un genre qu'on croyait éculé. Si
c'était pensé, voulu. Je me suis demandée si d'autres films, d'autres œuvres,
avaient déjà eu ça en elles, de manière aussi explicite. Sans doute, il est
tard, j'ai pas envie de chercher. Cette inversion assumée, toute en filigrane:
la femme devenant le sculpteur, le guide, le pygmalion. Celle qui sait, calme.
Watch and learn. Modeler un homme, un idéal, pas forcément romantique ni
sexuel. Non. Modeler pour le dépassement de soi. Quelque chose de plus grand,
de plus fort. Le lâcher prise. Peut-être que j'extrapole, peut-être que je vois
quelque chose qui n'existe pas.
Mais j'aime l'idée. Elle fait sens. Elle me fait sens. Qu'une
femme regarde pour observer, évaluer, agir. Ce female gaze, qui contrairement à
celui des hommes (qui ne font qu'objectifier les femmes), va donner un masculin
plus profond, plus complexe. Vulnérable. J'aime cette idée qu'une femme puisse
être l'architecte d'une histoire, d'un destin. Déceler le potentiel, inspirer,
motiver. C'est toujours comme ça que j'ai appréhendé le regard féminin:
permettre aux femmes de voir ce que les hommes eux-mêmes ne voient pas, ne
comprennent pas. Transformer sa vision de lui-même et du monde. Une autre
manière de redéfinir la dynamique des relations de pouvoir entre les sexes.
Vous commencez à me connaitre, vous savez où je me situe. La création n'est pas
l'apanage de l'homme. Elle ne l'a jamais été.
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