Quand j’écris par passion, je n’écris pas pour la vitrine. Je n’ai pas de costume, pas de mise en scène. J’écris comme on rature un journal intime, comme on se parle toute seule à trois heures du matin, quand il n’y a plus personne pour applaudir ou corriger. C’est brut, parfois bancal, souvent trop. Et c’est justement ça qui fait que ça respire.
Écrire comme métier, c’est autre chose. Là, il y a un cadre, des attentes, des deadlines, un chèque à la fin (si tout va bien). On polit les phrases, on arrondit les angles, on construit pour être compris. C’est pas forcément moins sincère, mais c’est une autre partition. Plus de distance, plus de maîtrise. Le texte doit tenir debout sans béquilles personnelles. C’est un travail d’artisan, avec ses outils et ses règles. Ça ne veut pas dire que c’est moins vrai, ça veut dire que c’est pensé pour l’autre. Pour être lu, compris, digéré. Pour avoir une portée au-delà de moi. Dans ces moments, faut l'admettre, ça n'est jamais par passion. Dorothy Parker le disait: Je n'aime pas écrire, j'aime quand j'ai écrit.
Je pense que c'est pour ça que j'ai arrêté. De rendre l'écriture comme un travail. Parce que je finissais par ne plus l'aimer. La passion n'était plus là. C’est là qu’on confond tout. On pense que parce qu’on sait écrire, on peut tout écrire. Mais non. Il y a une différence énorme entre l'ado qui note ses états d’âme dans un carnet taché de café, et le critique qui rend un papier calibré à 6 000 signes sur la dernière expo. Les deux ont une valeur, mais pas la même fonction. Le journal intime n’a pas de comptes à rendre. Le papier publié, si.
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